Jessica Jones S03 : La Trempe D’Une Héroine

Jessica Jones
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« Tu as ce qu’il faut pour être une héroïne ». Ce furent les dernières paroles de la mère à Jessica Jones avant que Patsy Walker, sa soeur de coeur, ne la tue d’une balle dans la tête. Depuis, Jess fait tout pour suivre ce motto car il est la seule chose qui lui reste d’Alisa. « Tous les jours, je n’y crois pas… » ressasse t-elle un verre de bourbon à la main. « Tous les jours, je m’efforce d’avoir la trempe d’une héroïne ». En sa mémoire. […] Tout est arrivé très vite. Un *toc toc* insistant à la porte de l’agence Alias Investigations suivi d’un coup de poignard au niveau de la rate. « Et ça fait un mal de chien ». Après avoir repoussé son agresseur encapuchonné, Jess aurait adoré le poursuivre en vue de lui casser quelques os mais la douleur était trop importante. « J’ignore pourquoi il m’a fait ça mais qu’importe, je le trouverai et je le neutraliserai ». Car c’est la bonne chose à faire. « Je me prendrais bien un petit  Bourbon ».

Le 20 mars 2018, je concluais ma review de la S02 de Jessica Jones. Qu’a t-il pu se passer entre temps pour que je fasse autant trainer mon écrit de cette ultime saison ? Simple et triste à la fois —> J’ai oublié qu’il y en avait une ! Pour situer mon état d’esprit de l’époque, Netflix venait d’annoncer coup sur coup les annulations de toutes leurs séries Marvel. Disney s’apprêtait alors à lancer Disney+ et toute une flopées de séries live en accord avec le MCU (Marvel Cinematic Universe). Cette annonce brutale m’a alors fait perdre tout intérêt immédiat pour le lore crée par Daredevil, Luke Cage et autre Iron Fist.  Jusqu’à aujourd’hui.

L’univers sombre et désenchantée de JJ m’a, en revanche, toujours plu. En partie parce que la psychologie de son héroïne (et longtemps anti héroïne) ainsi que celle des âmes qui l’accompagne font l’objet d’un travail soigné de bout en bout. Au cours de ces trois saisons, Jessica est parvenue à vaincre ses démons tout en sacrifiant ce qu’elle avait de plus cher au monde. Dans la première saison, tuer Kilgrave lui a fait franchir cette ligne rouge qu’elle redoutait tellement. Dans la deuxième saison, sa mère est réapparue avec du sang sur les mains avant de disparaitre brutalement. Puis, ici, ce soi dont elle avait toujours rêvé s’est obtenue au prix du lien avec la dernière personne qui comptait pour elle.

Patsy Walker. Son obsession d’être à son tour capable de donner le change et « créer un monde meilleur » aura fini par causer sa perte. Dans la saison 2, voire la saison 1, ce désir était déjà palpable et dérangeant. Une sorte de complexe d’infériorité mêlé au sentiment d’être capable de discerner le bien du mal tout en le punissant mieux que ne le fait la justice. L’ascension de Patsy à Hellcat. La certitude d’être « celle qu’il faut » dans ce monde impie.

De fait, Hellcat se transforme en anti-héroïne là où Jessica devient l’Héroïne que sa mère voyait en elle en arrêtant la seule personne qui compte à ses yeux. Je ne lis pas les comics mais de ce que j’ai compris, Hellcat a de nombreux points en commun avec le Punisher. Cette idéologie comme quoi les meurtriers méritent de mourir. En particulier lorsque la justice et l’idée de réinsertion qu’elle offre pose le risque de récidive.

D’une manière plus générale, la complexité des protagonistes et les démons qui les habite ne cesse d’être dessinée et étoffée avec une certaine maestria. Le personnage de Jeryn Hogarth, par exemple, prête à tous les coups bas pour reconquérir ce premier amour qu’elle a elle-même sacrifié à l’aune de sa carrière, et cela parce qu’elle se retrouve face une mort lente et douloureuse, m’a scotché. Le nombre de mauvaises décisions et les impacts tragiques que cela engendre les rend désespérément humains.

Malcolm Ducasse restera lui-aussi hanté par ses addictions et ses vaines tactiques pour s’en préserver. Et c’est ça qui fait toute la matière de Jessica Jones. Ce manque flagrant de happy ending pour qui que ce soit. Sombre du début à la fin. Et quelle performance du cast ! Avec une Krysten Ritter aussi cynique que magnétisante. Son ascension vers ce qu’elle avait peur d’être, cette trempe de héroïne qu’elle obtient au prix de tout, fait de cette série une odyssée poignante.

Jessica Jones

Bien sûr, il y a des défauts. Trop d’épisodes dans l’ensemble. Un format de 10 épisodes par saison aurait été plus judicieux. Sans omettre la réalisation franchement moyenne dès que les scènes d’action font leur entrée. Heureusement, ce n’est pas problématique pour JJ qui s’axe avant tout vers l’introspection, l’enquête et la dramaturgie. À cet égard, parlons un peu du nemesis de cette S03 qu’est Gregory Sallinger. À la fois surprenant, décevant et terrifiant.

Et pour cause, il ne s’agit que d’un « monstre ordinaire ». Un serial killer malsain, orgueilleux et intelligent. Le fait qu’il ait pu faire de nouvelles victimes parce que Jessica a fait en sorte de le coincer en respectant (plus ou moins) la loi est édifiant. Voilà pourquoi nous nous retrouvons avec des Hellcat et Punisher. Parce que le système judiciaire a des failles qui font parfois des victimes collatérales. Malgré tout, Jessica reste convaincue qu’il n’y a que de cette façon qu’un héros ne se transforme pas en vilain.

Cette série me manquera beaucoup ! D’autant plus que je crains que l’on ne retrouve jamais une telle noirceur dans les séries Disney+ à venir. Ces meurtres sanglants. Ce combat permanent des victimes d’agressions sexuelles. La prise à bras le corps de l’être humain et de ses facettes les plus brutes. Sexualité incluse. Croisons les doigts pour qu’un miracle se produise et que Jessica Jones et ses pairs fassent un jour leur entrée dans le royaume de Mickey.

Jessica Jones

Fondateur de YZGeneration, YummyZ, Ikke et Bang. Alter ego de Fafa Le Geek.

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