« Je ne comprends plus rien à rien… » se désespère un Ray ravagé par le poids des années. « Où sommes-nous ? Et Emma ? Ha, oui… Elle n’est plus là ». […] « Dix lieues au nord… » récapitule Emma alors qu’elle et Ray viennent de franchir la porte menant aux Sept Murs. « Dix lieues à l’est, dix lieues au sud, dix lieues à l’ouest, dix lieues vers le ciel et, enfin, dix lieues vers la terre ». Une fois que ces coordonnées auront été respectées, une flèche se fichera dans le sable, le soleil déclinera à l’est et les Sept Murs surgiront d’un coup, d’un seul. Le problème est que les deux camarades naviguent dans cette dimension depuis des heures ! « D’abord Grace Field… » rumine Ray. « Maintenant, le refuge ! Et ça recommence encore et encore ! ». Avec à chaque fois un envers du décor bouleversé. « Les Dédales de Nos Rêves semblent plus confus que ce à quoi nous nous attendions… » réalise Emma. « Il faudrait que nous… ». Mais la jeune femme n’a pas le temps de terminer sa phrase qu’une porte différente des autres apparait. « Allons-y, Ray ! ». À la poursuite de l’Impossible.
Je redoutais un emballement de l’intrigue suite à l’entrée en guerre de Norman et du Clan Geelan contre la Reine et les Cinq Familles Régentes —> Il n’en est rien ! Kaiu Shirai, le scénariste, parvient à temporiser comme il se faut l’odyssée des sept murs d’un coté, et l’avancée sur l’échiquier du mal de l’autre. J’apprécie beaucoup, par ailleurs, le focus apporté à Don et Gilda qui font de leur mieux pour non-seulement retrouver Mujika et Sonju, ces démons marginaux capables de conserver leurs capacités intellectuelles sans dévorer d’humains, mais pour les protéger ! Norman ayant à coeur de tuer les Sangs Maudits car ces derniers représentent un risque « trop important » au vu des enjeux. Dans les « dédales de nos rêves », à quoi ressemblent ceux de Norman maintenant qu’il a décidé de ne plus laisser de place à l’Espoir d’une paix universelle ?
En oeuvrant pour le génocide de toute une espèce, en les mettant dans le même panier tout en ayant conscience des exceptions à même de lui donner tort, Norman devient de facto un nemesis. S’il savait à quel point sa tyrannie a eu des effets délétères ! Prenez le cas de Ayshe, tireuse d’élite élevée par un démon avec amour et compassion. « Je devais survivre alors j’ai joué l’ignorante et obéi docilement… Tout en attendant l’occasion de venger la mort de mon père ». J’admets que je n’avais pas anticipé une telle tournure ! Je sais que cela est aisé d’affirmer une telle chose en l’état mais je pense que même Ray n’aurait pas autant bifurqué. À moins que Emma n’ait une aura telle que si les rôles avaient été inversés entre Norman et Ray, l’issue aurait été similaire. À ce sujet, plus les volumes défilent, plus on réalise à quel point Emma est celle qui détient la clé pour un bonheur qui ne reposerait pas sur des gisements d’os et des rivières de sang. Sa pureté d’âme et sa volonté sans failles lui ont permis d’aller au bout des dédales de nos rêves.
Même Ray n’a pas pu s’affranchir des sept murs. « Parce qu’il n’y en a jamais eu » explique le démon légendaire vivant aux cotés d’un dragon. Celui-là même ayant scellé une promesse entre Yverg du Clan Royal et le traitre Julius Ratri. Ses pouvoirs sont tels qu’il a pu créer deux mondes. L’un rempli d’humains libres n’ayant plus à subir la menace de finir dans l’assiette de démons. L’autre gouverné par ces derniers et des humains transformés en bétail. Soit les bovins, poules et autres animaux de notre monde pour lesquels nous n’avons que peu de considération. Leur valeur nutritionnelle et le plaisir gustatif qu’ils apportent ont bien plus d’importance. Pourtant, toutes ces espèces ont une âme et sont capables de ressentir la joie et la souffrance. En un sens, Mujika et Sonju sont les vegans du Promised Neverland. Et il me tarde de les voir riposter aux mauvaises intentions qu’engendrent la peur, l’égoïsme et la douleur. Les Dédales de Nos Rêves ne se sont jamais limités à notre seul espèce.
8/10
*Coup de Coeur*
