The Weeknd fait partie de ces artistes à la qualité constante. Quoiqu’il sorte, on sait que les émotions et le flow seront au rendez-vous. Out of Time ne déroge pas à la règle avec une mélodie lancinante et captivante. Figeant les sens et hypnotisant de bout en bout. Du moins jusqu’à ce que cet impitoyable réveil qu’est la Vie nous ébranle. Ce doux plafond de verre, cette fraicheur des rêves qui prend corps lorsque l’être aimé vous aime en retour. Pourquoi telle sensation ne semble t-elle durer qu’une seconde ? Pourquoi, avant même que l’on ait pu savourer ces moments, la faucheuse attend t-elle au boulevard des existences ? Le bonheur est si futile, si vain. À peine avons-nous l’impression de le saisir qu’il s’envole. À jamais. Ne subsistant qu’à travers des souvenirs de plus en plus floues et douloureux. Un purgatoire avant l’heure. Couloir aérien à même les limbes du destin.
Ce qui rend Out of Time si beau, c’est son osmose. Ses lumières douces et chaleureuses. L’éclat merveilleux et incroyable de Jung HoYeon. L’hommage évident à Lost In Translation de Sofa Coppola. Cette narration symbolique et angoissante qui fait comprendre que Abel est dans un état intermédiaire. Ce qu’il vit, ce qu’il ressent, c’est l’extase de la vie avant la fin. L’impression de pouvoir enfin toucher du doigt ce Happy Ending dont nous rêvons tous. Avant de se réveiller du coma de l’existence et réaliser qu’il ne nous reste que la peau sur les os. Et des regrets. Tant de regrets. Alors, forcément, on aimerait oublier et retomber dans les fantasmes éphémères. Mais le Rappel est implacable.
Ici, celui-ci prend la forme d’un Jim Carrey au cameo saisissant pour peu qu’on ait vu ses performance dans The Truman Show et Eternal Sunshine. Oeuvres elles-aussi hors du temps. Pourquoi nous obstinons-nous à poursuivre un Eden impossible ? Est-ce par bêtise, égoïsme, naïveté, cruauté ? Bah, qu’importe. Au bout du compte, on meurt tous.