Nous Rêvions Juste De Liberté : À La Belle Étoile

Liberté

« Nous avions à peine vingt ans et nous rêvions juste de liberté ». C’est, au mot près, la seule phrase que Hugo Felida, dit Bohem, parvint à énoncer face au juge. Sa seule et unique justification au regard de tout ce qu’on lui reprochait. « Soit tous les maux de cette fichue planète… » peine encore à y croire le désormais jeune adulte. « Et vous, chair de ma chair, sang de mon sang, comment avez-vous pu démolir mon âme à ce point ? ». Pour sûr, s’il serait complètement honnête, Hugo a une part de responsabilité dans le fracas innommable de saletés qui leur est tombé sur la figure. « Mais tout de même… » poursuit l’accusé en son for intérieur. « Ce goût de rouille ne veut pas s’effacer ». Plus le temps passe, plus les gens s’abîment, plus la liberté se morcelle. Petits bouts par petits bouts. Pour ne laisser place qu’à un passé idéalisé par endroits. Mais si beau, si pur ! « Quand je mourrai… » espère le Bohème. « J’aimerais revivre ces moments et seulement ces moments ». Histoire de trouver un foutu sens à l’enfer qui lui ronge les tripes. « Freddy, Le Chinois, même toi, La Fouine… Et si on remontait le bitume de nos putains de vies ? ».

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Difficile de sortir de la lecture de ce road-trip sans un arrière-gout amère. Et le coeur qui serre. Et les larmes qui montent. Il faut dire que les premiers pas de la bande à Freddy, désordonnés, parfois chaotiques, mais purs et rêveurs, laissent espérer un simili happy ending. Un filet d’espoir prompt à transformer les mauvaises graines en plantes vigoureuses et rutilantes. Ou plutôt, si on se cantonne à l’univers de bécanes et d’huile à moteur, en bécanes opérationnelles. Capables d’avaler les kilomètres de l’existence sans frémir. Un vrombissement permanent et étincelant.

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Pourtant, l’accident de la route, celui dont on ne revient pas, on le redoute tout du long. Comment voulez-vous qu’il en soit autrement lorsque des « bad boys » fondent un gang de motards en cochant une par une toutes les démesures (drogues, rivalités, larcins, violence) qui l’accompagne ? Alors, c’est ça, le prix de la liberté ? S’exalter l’espace d’une parenthèse pour mieux se faire éviscérer par la suite ? Hugo, héros naïf et brisé, y aura cru jusqu’au bout. Même lorsque son meilleur ami, son amour d’une vie, aura su dire « Non » au bon moment.

Quelle écriture remarquable au passage ! À la fois bourrue et distinguée. Prompt à fluidifier les pérégrinations des natifs de Providence, ce trou (noir) à rats, et nous embarquer dans leurs folles élancées. Puis les personnages ! Henri Loevenbruck prend un soin certain à dépeindre ces aspérités et qualités qui, mises bout à bout, forment le puzzle raté de l’Amitié. Impossible de ne pas s’attacher ! Qu’il s’agisse de la Bande à Freddy des débuts ou de celle à Hugo. Celle de la fin.

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Pour info, je ne suis pas du tout road trip, ahah. Bien au contraire, mon train de vie est casanier et la philosophie biker ne résonne pas du tout en moi. Cette débauche. Cette démesure… En revanche, et c’est peut-être là l’essentiel, la liberté d’être soi, elle, me parle. Cette aspiration vitale à vouloir réaliser des rêves qui s’effrite au fil du temps. Qui, parfois, s’éteint lorsque l’on devient adulte. En voilà une fichue liberté ! Et elle ne pouvait pas mieux être retranscrite.

On pourrait penser aux ailes d’un aigle royal qui s’ébattent encore et encore. Même lorsque le goudron les recouvre et que la chute se fait imminente. Être libre, c’est une putain de philosophie. Oscar, notamment, dit Le Chinois, l’aura incarné jusqu’au bout. Et c’est probablement pourquoi il fait partie des personnages m’ayant le plus impacté au cours de ma (longue) lecture. Alors que je l’aurais assurément pris en grippe dans la vraie vie, ahah.

Voilà qui justifie tout, n’est-ce pas ? Y-compris les baffes et les coups de poignard. « Ça vaut toujours mieux qu’une vie sans vous ». Ayant lu trop peu de livres, difficile pour moi d’affirmer que ce roman est incontournable. Pour autant, à mes yeux, il l’est. Encore plus que Kakfa sur le Rivage qui m’avait déjà bien retourné. Laissez-lui une chance et, pour peu que vous ne soyez pas un « vieux con » prompt à dézinguer ces délinquants sans qui le monde se porterait bien mieux, je vous garantis un voyage inoubliable.

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Publié le
Catégorisé comme YZ

Fondateur de YZGeneration, YummyZ, Ikke et Bang. Alter ego de Fafa Le Geek.

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Inosuke971
1 année il y a

Yo tu connais une série qui s’appelle Power ?

Inosuke971
1 année il y a
Répondre à  Faël Isthar

Ah ok tu devrais regarder c’est trop bien, c’est sur un trafiquant de drogue qui ouvre une boite de nuit et tente de construire une nouvelle vie seulement voilà tout ne se passe pas comme prévu…