Kafka Sur Le Rivage : À La Recherche De Soi

Kafka Sur Le Rivage
Kafka Sur Le Rivage

Avant de quitter une maison qui n’a jamais été la sienne, Kafka Tamura prend bien soin de voler l’argent liquide qui se trouve sur le bureau de son père. En plus d’un petit briquet ancien en or et un couteau pliant très pointu. Une lampe de poche, des lunettes de soleil pour tenter de dissimuler son jeune âge (15 ans), une photo de lui et sa soeur aînée qu’il n’a plus revu des années —> Kafka est paré pour s’enfuir et ne plus jamais revenir. « Tu es prêt ? » lui demande Corbeau, le garçon constamment présent dans sa tête. « Je crois ». « De toute façon, tu n’as pas le choix, Kafka sur le Rivage ». « Je sais bien ». Ne rien montrer. Être sans pitié. Survivre seul. Et ne plus s’attacher à qui que ce soit. « De toute manière… » se dit Kafka. « Je ne me rappelle même plus quand j’ai ri de bon coeur pour la dernière fois ». Sur ces tristes paroles, adieu. « Je ne t’ai jamais aimé, Papa, mais je n’ai pour autant aucune envie de te tuer comme tu en sembles convaincu ». Adieu, foyer froid. Adieu, sombres émois. C’est l’histoire d’un garçon à la recherche de soi.

Depuis combien de temps avais-je envie d’écrire sur le premier roman ayant singulièrement impacté ma courte vie d’adolescent fugace et innocent (ahah) ? Oui, Kafka sur le Rivage est ce livre que j’ai choisi pour sa couverture intrigante et, il me faut bien l’avouer, parce que j’étais et reste passionné par la culture japonaise. De fait, je me suis lancé dans l’inconnu. N’ayant aucune idée du pitch et désirant imbriquer ma pensée à celles, plus structurés et inspirés, d’autrui. Ici, en l’occurence, il s’agit de Haruki Murakami. Une sommité en la matière et l’un des romanciers japonais les plus illustres de par sa capacité à attribuer de la substance à l’impalpable. Faire de l’onirique et de la fantaisie macabre une expérience à part entière. En cela, Kafka m’a bouleversé. Du moins à l’époque.

Je ne me souviens même plus de quel âge j’avais. 15 ans, comme Kafka ? Non, un peu plus âgé. Avant, je lisais essentiellement des romans dits jeunesse tels que Harry Potter ou La Croisée des Mondes. Kafka sur le Rivage fut ma première initiation à cette recherche de soi et ces sentiments à fleur de peau, complexes et tortueux, qui ont tendance à habiter chacun d’entre nous. Cette quête désespérée et idéalisée de l’Amour. Elle nous éprend adolescent(e)s mais également bien au-delà. Ce qui rend l’oeuvre d’Haruki Murakami si marquante est qu’elle parvient à toucher nos fragilités et brisures à travers des composantes sociales et humaines qui nous concernent toutes et tous. Cela en les mêlant à un univers fantastique des plus envoutants.

Kafka Sur Le Rivage

Nakata, vieillard se pensant idiot mais doté de l’extraordinaire pouvoir de parler avec les chats. Mademoiselle Saeki, éternelle jeune femme piégée dans un passé qu’il lui est impossible d’effleurer à nouveau. Hoshino, loubard au quotidien banal décidant de se saisir d’une opportunité exceptionnelle pour devenir à son tour exception. Oshima, bibliothécaire transgenre embrasant sa curiosité intellectuelle au point de filtrer avec le danger. Sakura, guerrière de l’invisible tentant de combattre un mal qui ne dit jamais son nom. Chaque protagoniste a la sensation de vivre en marge de la société. Une angoisse existentielle mêlée de désirs interdits et refoulés. Le tout enveloppé d’odes au jazz et à la musique classique. Au final, nous sommes transporté(e)s dans une bulle qui ne cherche pas à être comprise mais vécue. Il y a 15 ans de cela, Kafka sur le Rivage m’avait bouleversé. En le relisant, j’ai été moins marqué. Parce que j’ai grandi. Parce que j’ai découvert d’autres oeuvres. Parce que mon horizon n’est plus le même et que les démons qui m’accompagnent sont à la fois plus distincts et plus troubles que jamais. Pour autant, lisez ce roman. Selon votre trajectoire personnelle, la sensation éprouvée pourrait être décuplée (ou amoindrie). C’est peut-être ça, le génie de Kafka.

8/10

*Coup de Coeur*

Kafka Sur Le Rivage
Publié le
Catégorisé comme YZ

Fondateur de YZGeneration, YummyZ, Ikke et Bang. Alter ego de Fafa Le Geek.

Voir tous les articles de Faël Isthar.
S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires