Gen est plus qu’un manga, c’est une œuvre d’art considérée par beaucoup comme le tribut le plus emblématique du Japon post-Hiroshima/Nagasaki. Irradié par les rejets radioactifs de la première bombe atomique qui toucha Hiroshima, Keiji Nakasawa est mort d’un cancer des poumons : tout comme sa mère 20 ans plus tôt. Et que ce soit pour Hiroshima, Tchernobyl ou Fukushima, l’auteur se sera toujours érigé contre les dangers que représente le nucléaire.
La qualité de Gen, son œuvre majeure, n’est pas tant dans son dessin rugueux mais plutôt dans la force de ses personnages, de leurs émotions et de la violence graphique se dégageant de la catastrophe d’Hiroshima. En partie auto-biographique, Gen retranscrit l’effroi et l’impuissance de l’auteur quand cette bombe, surnommée « Little Boy » par les américains, heurta le sol de la ville. Car n’ayons pas peur des mots : Hiroshima et Nagasaki ont été des génocides et peuvent même être qualifiés de crimes contre l’humanité dans la mesure où un nombre important de civils ont été tués (2/3 des 75 000 victimes tuées sur le coup pour Hiroshima). En n’oubliant pas ceux qui furent contaminés par la suite à cause des radiations.
Après il faut dire que le contexte géopolitique était particulier : les japonais faisaient partie des puissances de l’axe (donc avec l’Allemagne hitlérienne) et avaient auparavant attaqué Pearl Harbor qui, certes, était une base militaire. Qui plus est, les américains avaient posé des conditions de reddition avant de lancer l’attaque mais qui furent rejetées par l’état japonais alors principalement gouverné par les militaires.
Mais cela n’excuse rien : beaucoup de civils ont été inclus dans l’explosion et eux n’avaient rien à voir avec ce massacre et n’avaient pas à y être impliqués. C’est pourquoi ce type d’œuvre est importante et doit impérativement être reconnue comme telle. Nos pensées à ce grand auteur qui aura su brillamment retranscrire l’émotion d’alors.
