« L’ampleur des dégâts ? » demande Serpent. « Un paquet de farine et de la viande sèche ! » lui répond un de ses hommes. « Leurs empreintes se sont mêlées à d’autres… » ajoute Renard. « Mieux vaut abandonner l’idée de les pister ». « Ils volent peu mais régulièrement… » poursuit Serpent. « Pas le choix… Il va falloir frapper fort ». […] « Vraiment ? » s’étonne Arnheid alors que Einar lui raconte comment lui et Thorfinn sont parvenus à obtenir l’aide de Sverkel. « Ça veut dire que le vieux maître vous aime bien ! ». « Ha, bon ? ». « Il vous prête ses outils, ses chevaux et il vous invite même à table pour manger avec lui… Bien sûr qu’il vous aime bien ! ». « Il ne fait que nous rendre la pareille vu les corvées qu’il nous impose ! » bredouille Einar. « On est des esclaves, je te signale ! » rit Arnheid. C’est à ce moment que l’amoureux bêta réalisa à quel point elle avait raison. « Aux cotés de ce vieux bougon, on en a presque fini par oublier notre condition ».
Malheureusement, Arnheid n’a pas eu le droit à la même bienveillance que le vieux Sverkel emploie envers Einar et Thorfinn. Dans leur malheur, ces deux-là ont l’opportunité de « gagner » leur liberté. De même, Thorfinn a eu une chance incroyable de tomber sur quelqu’un comme Einar. C’est grâce à son pacifisme naturel qu’il pourra, je l’espère, emprunter un chemin éternel de rédemption. « Dépasser notre condition ». Selon les circonstances, selon la chance, tout peut arriver. L’espérance de vivre de meilleurs jours. Ou la souffrance et la mort.
Ici, malgré les inquiétudes, Ketil apparait comme un maître relativement porté sur l’empathie. Pour peu que la voie de la raison s’offre à lui, il préfèrera user de méthodes peu violentes pour imposer l’ordre sur son domaine. Contrairement à son fils ainé, Thorgil, bien plus enclin à user de son épée. Le cas de ces deux enfants n’ayant eu d’autre choix que de voler aura été éprouvant. Il ne voulait pas les punir de coups de bâton mais s’est senti acculé. « Ils attendent tous de moi à ce que je sois sans pitié… Mais je suis faible ». « Être bon ne saurait être considéré comme une faiblesse… » lui répond une Arnheid enchainée. « Jamais ». Quelle oeuvre, mes aïeux. Quelle oeuvre !
